Méditation / EMItation
Expérience, évidence, excellence
Le dernier blog (n°12) nous a proposé un bilan de notre démarche expérientielle et scientifique. Il annonce les neurosciences et les applications à l’art de vivre. On anticipe. Il me semble judicieux d’annoncer déjà les belles choses qui se promettent avec EMI, OC et POH. Aujourd’hui, c’est reprise de la pratique, la plus simple et complète, que j’essaye même d’appeler EMItation ! Oui ? Comme Méditation ? Avec la différence fondamentale que nous n’avons pas besoin de nous bagarrer entre les deux pôles spirituel et laïc. Rappelez-vous. Kabat-Zinn, le créateur de la MBSR (mindfulness based stress reduction) se débat comme un beau diable (dans le bénitier) pour insister sur la laïcité de sa « pleine conscience ». Venant de vipassana, zen et yoga, c’est hard. Toutes ces pratiques sont des variables instrumentalisées à hue et à dia. Mais l’EMI est l’invariant, le processus commun, qu’on ne peut pas instrumentaliser. Deux milliards d’expérienceurs (spontanés) sur les huit milliards d’humains !
A la place du coup de massue, du viol, de la noyade ou du coma, il suffit de « porter son attention sur ». Voici le processus unique de la Médi-EMI-tation. Juste faire attention à l’objet de la contemplation. Pas trop concentré, pas trop distrait. En fait, c’est physiologique. Il suffit de porter votre attention sur le fameux cube de la Gestalt Psychologie allemande d’il y a cent ans. Fixez bien ce cube en trois dimensions jusqu’à ce que…
Schéma 8 : le cube et la bascule visuelle physiologique
Vipassana
Si vous jouez le jeu, vous expérimentez que vous ne pouvez pas rester plus de (près de) 15 secondes sur le même objet (face antérieure à gauche et en bas ou à droite et en haut). Nous voilà dédouanés de tous les reproches de distraction. C’est pas moi, c’est mon cerveau ! Et voici aussi la raison du mode de méditation originaire et le plus répandu : vipassana. On porte son attention pendant 15 secondes sur une partie du corps puis sur la suivante jusqu’à balayer tout ce corps en une durée donnée. La sophrologie et Kabat-Zinn ont repris ce modèle fondateur. Pour la « Présence Juste », il y a trente ans, j’ai mis la relaxation de Schultz à cette place : « le bras droit est lourd… la jambe gauche est chaude, la respiration est calme et profonde… » On fait vipassana mais on induit aussi la sensation à observer. Or ce n’est pas nécessaire car çà vient tout seul. L’attention portée sur un segment détend les muscles striés, ce qui alourdit ce segment qui devient lourd. En même temps, elle « syntonise » la musculature lisse, ce qui éveille l’énergie voluptueuse et amène le sang sous la peau qui se réchauffe (de 0,2°). Actuellement je reprends carrément Vipassana en huit lieux (à revisiter plusieurs fois si nécessaire).
Etape I – Vipassana et II – Chakras
Pratique de la première partie : vipassana
Entrez dans la position méditative classique avec un maximum de muscles relâchés et le dos droit. Portez votre attention sur :
- les deux pieds (2 secondes d’induction et 12 secondes de silence),
- les jambes,
- les cuisses,
- pieds, jambes, cuisses,
- les hanches,
- les deux membres inférieurs.
Continuons plus haut:
- les deux mains (12 secondes de silence),
- les avant-bras,
- les bras,
- mains, avant-bras, bras ;
- les deux épaules,
- les deux membres supérieurs,
- des pieds aux épaules.
L’attention se porte de bas (pieds) en haut (hanches, épaules) et permet aux sensations énergétiques de circuler dans le même sens. Si on s’arrête là, nous effectuons l’essentiel de toute relaxation.
Chakras et kundalini
La référence à Vipassana est la reconnaissance de l’art du bien vivre des Orientaux. Et nous continuons (laps et relaps !) en appelant chakras les lieux où se porte notre attention sur le tronc et la tête. Soyons clair (et provocateur). Les chakras n’existent pas en soi. Ils ne sont que l’effet sensitif, énergétique et jouissif de notre attention. La preuve : il y a de nombreux systèmes qui reconnaissent trois, cinq, sept, ou onze chakras. C’est donc arbitraire. Pour ma part, je me joins au mainstream à sept chakras. Là encore çà monte de bas en haut en un mouvement appelé kundalini qui débouche dans le cerveau et déclenche l’effet phare de l’EMI, le tunnel noir et la lumière. Je n’en dirai pas plus sur l’effet de l’attention donnée à ces chakras. Nous en restons ici à la pratique expérientielle. Le protocole de cette pratique est logique. L’initiateur prend :
- deux secondes pour désigner le lieu où porter l’attention et
- laisse une douzaine de secondes pour le faire,
- il y a donc quatorze secondes pour chaque segment et c’est de la méditation en continu.
Je porte l’attention sur :
- le premier chakra, devant le coccyx (15 à 20 secondes),
- le deuxième, dans le creux des lombes,
- le troisième chakra, au bas du dos,
- le quatrième, derrière le cœur, devant la colonne,
- le suivant, dans la nuque,
- le sixième, sous le crâne, dans le cerveau.
En plus de ce travail volontaire (d’attention) et focalisé, il se passe déjà des choses diverses. D’autres sensations, émotions et sentiments, des images et des intuitions adviennent, que nous laissons venir comme des compléments bienvenus et non pas comme des distractions. Elles nous obligent à élargir le champ de la conscience, ce qui n’est que benef ici. Si nécessaire, on peut induire cette expansion en suggérant les couleurs reliées à chaque chakra (selon mainstream) : rouge, orange, jaune, vert, bleu, violet, blanc ou doré.
Ce mouvement énergétique constitue une espèce de tuyau devant la colonne vertébrale (analogue au caducée des médecins). Ce contenu peut subitement devenir un mouvement spontané, puissant et voluptueux puis, au fur et à mesure, un envahissement plus doux.
Tunnel noir et lumière
En EMItation, nous privilégions l’envahissement du cerveau par ce flot d’énergie qui provoque la « synchronisation psycho-cérébrale » attestée par les recherches en IRMf. On sent le cerveau s’unifier, ne faire qu’un et, assez souvent, s’obscurcir. Le mouvement énergétique (la kundalini) veut continuer et, avec les chakras classiques, il va au-dessus de la tête ou redescend à l’avant du corps. Pour l’EMI, c’est la troisième direction qui est privilégiée, par le front, le troisième œil, et l’avant, droit devant (strait on). Tunnel noir et lumière sont à présent bien connus. Mais c’est un processus plus caractéristique qui m’est advenu récemment et qui s’est imposé avec évidence comme le critère majeur de la bascule ontoneuro qui ne se fait pas seulement dans la tête mais tout autant dans le cœur et dans les tripes.
A présent, les inductions par l’initiateur ne se limitent plus aux deux secondes sur quatorze mais peuvent être plus développées et espacées (surtout avec des débutants).
- l’énergie kundalini envahit le cerveau et le synchronise,
- atténue l’emprise volontaire,
- obscurcit éventuellement ou illumine déjà avec félicité.
- Elle est attirée vers le front et par le troisième œil,
- constitue un cône hélicoïdal se rétrécissant vers l’avant,
- Elle décrit le fameux tunnel noir,
- puis ce sont lumière et/ou plages de couleur…
Si çà ne vient pas aussi simplement, c’est que çà bloque quelque part. On reprend l’élan. Je porte mon attention sur :
- les pieds jusqu’aux hanches,
- les mains jusqu’aux épaules,
- les chakras du coccyx, des lombes, du bas du dos, derrière le cœur, aux épaules jusqu’au cerveau et
- je me laisse haper par le tunnel et la lumière.
Unification
Et c’est là que çà se passe quand on laisse advenir. Entre le sombre et le clair, une vague de douceur s’éveille et envahit tout le corps, de haut en bas, l’unifiant, l’uniformisant, le globalisant. De sept chakras on passe en un unique et immense chakra. Les sept anneaux reichiens s’expansent et se globalisent en ce réflexe orgastique promis et unificateur (de bas en haut). Le cœur et tout le thorax émettent une bouffée d’amour soutenue et délicieuse.
Ventre, cœur, tête, vision, c’est tout un et tout bon.
Etape III – immanen/(trans)scendance
Cette vague d’unification (étape 17) marque réellement la bascule ontoneuro. Elle peut s’initier partout, dans les trois dimensions constitutives, en particulier :
- dans l’esprit (tunnel-lumière) étape 16,
- le cœur (bouffée amoureuse) étape 18
- et le corps (grosse boule d’énergie) étape 19.
Elle ne fait qu’un et nous emmène dans ce tout qui n’est rien, dans ce vide qui est plein et ce nirvana qui, en évitant les réincarnations, nous met en Pleine Présence, pérenne, éternelle. Ces trois processus de syn-(thèse) sont largement décrits dans le blog psychanalyse.
C’est le mode auto (nome).
Comme initiateur, je me tais et laisse le temps de déguster.
Chez nous, Occidentaux, on privilégie l’imaginaire débridé mais aussi les sensations luxuriantes dans des environnements paradisiaques et, last but not least, la rencontre avec des personnes aimées vivantes, défuntes et/ou virtuelles. Il est difficile de représenter ce mode auto. Ce serait l’étape 4. Quant à la restructuration imaginaire dans le mode holo, elle se ferait le mieux à travers un tanka comme celui que j’ai ramené de New Delhi il y a trente ans où j’avais fait une conférence sur la somatanalyse au All India Institute of Medicine.
Etape IV – 20 extase, 21 créativité holistique
Cette pratique fait expérience, crée l’évidence et valide par l’excellence de ces vécus. C’est bon, beau et bien, donc évident. Nul besoin de science ou croyance. J’y suis. That’s it. Et çà marche même. It works comme nous le témoigne Béatrice Bresciano, une élève psycho-somatothérapeute et psychanalyste jungienne.
« L’EMI est un acronyme que je méconnaissais jusqu’alors. Sans pouvoir la nommer, j’en avais toutefois entendu parler en tant que réalité, comme beaucoup d’autres personnes, et parce que mon père l’avait connue lors d’un accident au cours duquel il avait failli perdre la vie, en 1965. Si besoin, je précise que j’étais alors dans le ventre de ma mère qui m’attendait depuis cinq mois, et que je n’ai été informée de ce vécu de mon père qu’après son décès, en 2016.
Ma première EMI eut lieu à Lipsheim, en juillet dernier, lors d’une méditation guidée par ta voix, un matin. Ce premier voyage fut merveilleux et intense.
Il commença par une vision de tunnels, bien réels, puisqu’il s’agissait de ceux que je traverse lors de mes balades à vélo à San Remo, en Italie (c’est une ancienne voie ferrée réhabilitée en piste cyclable).
Mon rythme cardiaque s’accélérant beaucoup, j’ai ensuite « vu » et traversé du noir, uniquement du noir. Ce tunnel n’en était pourtant plus un puisqu’il ne comportait aucun mur, ni aucune structure. Ce noir était réellement très noir, d’un noir absolu. Je prends soin de poser des guillemets au mot « vu », car j’étais à ce moment complètement aveugle et sourde. Je ne voyais plus rien ni ne percevais plus aucun bruit autour de moi. Je n’étais plus là, parmi vous. Je me sentis portée.
Je pense qu’après ce noir intense, il y eut une sorte d’ouate blanche, disposée comme de petits nuages, représentant la fin de ce que beaucoup décrivent tel un tunnel, mais je n’en suis plus certaine. Je n’ai pas un souvenir clair de ce point précis.
En tout cas, c’est après avoir traversé ce noir absolu et peut-être cette ouate, que m’apparut une Lumière blanche que je nomme avec une majuscule car, jamais de ma vie, je n’avais perçu une lumière d’une telle force et d’une telle beauté.
Ce fut un moment de plénitude et d’extase au cours duquel je connus un bonheur très intense et une joie inédite. Je ressentis aussi la présence de mon père, sans l’avoir pourtant vu en personne. Je sentais que j’étais avec lui, c’est tout.
C’était extrême. Je me souviens d’avoir pensé que je n’avais jamais rien vu d’aussi beau et de m’être dit « C’est Là, et C’est merveilleux ».
Je revins au sein du groupe (je ne sais pas si ces mots sont adéquats, mais c’est ce que je ressentis), grâce au bruit du paquet de mouchoirs en papier que ma voisine m’offrait pour sécher mes larmes qui coulaient à flot.
Mon cœur continuait à battre puissamment dans ma poitrine et je tremblais vraiment beaucoup. Me demandant ce qu’il m’arrivait et un peu honteuse de mon état, je me levai pour aller aux toilettes me rafraîchir. Je me souviens d’être difficilement parvenue à me laver les mains tant elles s’entrechoquaient.
Revenue à ma place, je ne réussis qu’avec peine à tenir mon stylo. Cet état a perduré quelques minutes encore. Je suis ensuite allée me reposer à l’heure du déjeuner, prise d’une grande fatigue.
Durant l’après-midi, j’hésitai à te parler de mon vécu ce matin-là, presque convaincue que je ne serais pas crédible. Après réflexion, je ne t’en touchai mots que le soir, entre deux portes, et restai donc quelque peu frustrée par notre échange trop bref, au regard des émotions que j’avais ressenties.
Pourtant, les jours suivant ce voyage merveilleux, je me vis empreinte d’un immense bonheur ; je me sentais comme en avance sur mon temps, comme pourvue d’ailes légères qui me permettaient de voler : « je planais, je savais ».
Les mois passant, ce sentiment de plénitude s’est peu à peu mêlé à de la peur. Peur physique face à cette accélération totalement inusuelle et puissante du rythme cardiaque et peur…de ne pas revenir de ce voyage bien insolite.
Ma deuxième expérience émique eut lieu en mars dernier, lors de la semaine Jung, au cours des exercices de vocalises et autres, élaborés par tes soins.
Prévenue par Julie et Rachel dès le début de la semaine que de tels exercices nous seraient proposés, je leur avais fait part de ma première EMI et des sentiments mêlés d’envie, de joie et de peur que je ressentais depuis lors. Je me prêtai pourtant aux exercices, à la fois très curieuse et inquiète.
Le premier cycle de vocalises ne produisit aucun effet tangible ; je commençai par contre, lors du deuxième cycle, à éprouver des difficultés à émettre les vocalises tout en ressentant peu à peu une accélération de mon rythme cardiaque. J’entendis (c’est comme si je les entendais vraiment, en plus de les sentir) les battements de mon cœur, qui battait plus fort, soudainement et progressivement. Je sentis aussi les muscles de mon visage se détendre, notamment ceux des lèvres.
Je visualisai alors des voiles de couleurs très foncées, gris, vert, violet notamment, se mouvant au gré d’un souffle, tel un vent. Comme la première fois, je vis ensuite le noir, mais ce noir n’était pas ce noir absolu que j’avais connu, mais un gris foncé. Au bout de ce « quasi noir », j entrevis au loin une tache grise plus clair, de forme circulaire, représentant très certainement la Lumière sus-décrite, mais cette fois, je ne l’atteignis pas.
C’est ensuite que je « revins », et fus submergée par un flot de larmes incompressible, et cela, durant un très long moment. Je pleurais sur moi-même, me reprochant de « ne pas y être allée », puisque ma peur avait vaincu mon désir d’y retourner. Je pleurais de ne pas avoir « vu » mon père une nouvelle fois… Je pleurais sur cette contradiction. Je pleurais sur ma différence aussi. Ressentant une réelle confusion intérieure, j’eus un peu de mal pendant les minutes qui ont suivi à structurer mes phrases.
Contrairement à la fatigue induite par la première EMI, je dormis très peu cette nuit-là ; j’étais très agitée, probablement en raison de la force mentale que j’avais dû déployer pour « freiner » ce nouveau voyage. Je me surpris aussi à être en colère contre moi-même parce que je m’en voulais de m’être ainsi contrôlée ; plus tard, je fus toutefois envahie par un sentiment d’indulgence pensant que j’avais bien le droit d’avoir peur.
En effet, l’EMI est un phénomène très puissant, que ni notre culture ni notre éducation ne nous permettent de comprendre. On n’a pas encore les clefs pour la déchiffrer et elle se nomme quand même EMI, expérience de « Mort » imminente et initiante. En principe, ceux qui en parlent sont ceux qui l’ont vécue lors d’une maladie ou d’un accident. Elle est donc souvent concrètement associée à des soucis de santé.
Une EMI telle que celle que j’ai vécue chamboule pourtant bien des codes. Ne comprenons-nous pas dès l’enfance qu’on naît un jour pour mourir un autre ? Ne nous parle-t-on pas de l’enfer et du paradis, des morts qui vont au ciel, de la mort qui est une fin ? Ne convient-il pas désormais de fortement nuancer ces affirmations, et même de les infirmer ?
Je pense que oui, car je sais désormais que tout cela n’est plus exact. La mort n’a pas ce caractère définitif, et on peut accéder à ce monde sans mourir et en revenir, en revenir et puis y repartir. On peut donc y rencontrer nos êtres aimés, car ils sont là. C’est en tout cas la lecture personnelle de ce que j’ai vécu.
J’aimerais revenir à présent sur l’interprétation des différentes couleurs perçues lors des deux EMI. Dans la première, les couleurs avaient un caractère absolu, ou tout noir ou tout blanc et lumineux, alors que, dans la deuxième, elles étaient beaucoup plus ternes, bien qu’il s’agisse clairement du même « endroit ». Je pense que ce changement de couleurs fut induit par ma prédisposition mentale. Dans le premier cas, j’étais novice et ingénue et me laissai donc porter par ce voyage. Dans le deuxième, j’avais peur.
Je me demande donc comment une même « réalité » peut avoir des couleurs distinctes, selon nos apriori ; je tente de me répondre en me disant que cette « réalité » n’en est peut-être pas une, parce que cet endroit n’existe pas, que ce n’est pas un lieu. L’EMI ne serait-elle donc pas un procédé alchimique de transformation de l’âme, qui lui permettrait d’accéder à un autre monde, immatériel ? C’est en tout cas mon interprétation aujourd’hui. Je précise que tous ces détails sont tirés de mes expériences et ne m’ont absolument pas été dictés par quelque recherche ».
Commentaire
Quel beau témoignage naïf et vrai, avec toutes les interrogations de la novice qui se raccroche encore aux convenances et connaissances sécurisantes.